Comment Hugolin d'Estrée devint baron d'Ayn'n à la place de Roland


1. Préambule

Afin de bien faire comprendre à nos frères et sœurs de foi de quoi la narration de l'entrevue qui va suivre retourne vraiment, et pour être agréable à Tyr dont le dogme veut que les faits soient conservés en mémoire, je juge utile de rapporter ce qui s'est passé entre le Concile Blanc et feu Sa Majesté Walmund Ier, à propos de la baronnie d'Ayn'n, alors encore occupée par les troupes de Ghaash comme c'était le cas depuis plusieurs années, après avoir vécu dans l'ombre d'un temple de Loviatar maintes autres années avant ces dernières..

Conseil de guerre au Palais de Thola




Ainsi, lors du conseil deguerre s'étant tenu au palais royal de Thola [le 5 janvier 2011], je me suis clairement déclaré contre la tolérance, voire l'union avec un groupe de mercenaires du nom de Soleil Vert, dirigé par des Bainites (du Zentharim, comme cela fut connu plus tard) et occupant le Village sans nom sous le beau prétexte de protection, de même que je proclamai que la lutte contre les ténèbres était la spécialité de notre ordre avant quiconque. Cela me valut d'être expulsé dudit conseil, et d'être conduit en une cellule du Fort des Lions, alors encore debout.

Roland de Jasperal et Walmund Ier au Palais de Thola

L'emprisonnement ne dura qu'une nuit, et je fus reçus au lendemain par le roi en particulier, en une suite du palais. C'est lors de cette rencontre qu'il émit le souhait, en échange de notre service, que la baronnie d'Ayn'n, une fois délivrée, fût gérée par la Triade (qu'il prit soin de distinguer du Concile), pour reconstruire et constituer un pôle d'opposition à la montée en influence de Baine – vue prophétique – et que le titre de baron revînt à un chevalier triadique – il me demanda de choisir ce dernier avec mes frères.

Walmund Ier en la chapelle de la Triade de Thola

Lors d'une réunion concilienne, [le 10 janvier 2011], le choix se porta sur mon nom pour devenir le futur baron d'Ayn'n, choix qui fut communiqué par les trois Hauts Frères du Concile Blanc au roi [le 24 février 2011] en notre sainte chapelle de Thola. Il est inutile de poursuivre en vous narrant par quelles épreuves et souffrances une victoire toute relative fut acquise contre Ghaash ; là n'est pas le sujet.

Mais il n'est pas mauvais de rappeler que quand nous, les survivants de la bataille de la Croisée, nous sommes portés vers Ayn'n [le 18 mai 2011], ne pouvant regagner nos pénates occupées traîtreusement, nous y trouvâmes le duc de Manloen qui venait de la délivrer sous mandat royal avec une expédition respectable de ses troupes, accompagné par messire d'Estrée.

Sigurdur Kvern, duc de Cirbann, Roland de Jasperal, Hervé de l'Isle-de-Mont, duc de Manloen

Malheureusement, sa flotte avait été entièrement détruite par une tempête, et lui et ses hommes se trouvaient enfermés tout comme nous à Ayn'n, face à l'occupant. Si bien qu'au bout de quelques jours, [le 23 mai 2011], et malgré une discussion poussée avec moi et le duc Kvern (ce dernier espérant alors représenter une régence identifiable), craignant pour sa sécurité ainsi qu'un ralliement très inopportun, le duc Manloen décida de se rendre à Thola pour y rencontrer l'usurpateur. Son argumentation sur la pérennité économique ne nous laissait guère de doute sur ce qui allait se produire... Le duc de Manloen revint à Ayn'n [le 27 mai 2011], et ne s'entretint de ce qu'il s'était passé qu'avec le duc de Cirbann. C'est Hugolin d'Estrée qui m'apprit la substance de cette discussion.


2. Hugolin d'Estrée

Roland de Jasperal et Hugolin d'Estrée

Comme le duc de Cirbann, Sigurdur Kvern, m'en avait prévenu après son entrevue avec le duc de Manloen, Hugolin d'Estrée en sollicita donc une avec moi. Il commença par me demander si le duc Kvern m'avait parlé ; quand il comprit que ce dernier ne m'avait rien appris, messire d'Estrée déclara simplement combien sa position était incongrue, et à quel point l'usurpateur – terme qu'il employa de lui-même – était aussi fin stratège que machiavélique, comme il l'avait pu constater à ses frais. De toute évidence, il avait donc fait le voyage vers Thola avec le duc de Manloen.

Sans préciser tout de suite ce qu'il en était, messire d'Estrée m'évoqua son père, Salomon d'Estrée – un ancien prévôt de Thola priant Tyr et estimé par tous, ainsi que le serment des d'Estrée qui se trouvait brisé par ce qui était qualifié de « manigances abouties » : « veiller sur Thola et ses habitants, à tout prix. » Affichant ma compréhension, j'expliquai que les anciens du Concile Blanc ressentaient pareillement le fait de voir nos œuvres traitées de manière inique, ce sur quoi mon interlocuteur m'apprit que si la chapelle était fermée, seule la ferveur de quelques habitants de Thola lui permettait de résister aux sabordages des séides de l'usurpateur.

C'est alors qu'Hugolin d'Estrée en vint au fait, me déclarant, non sans quelque appréhension, qu'il savait que j'avais brigué la baronnie d'Ayn'n, et qu'il espérait que je ne ressentais aucun malaise de la situation. J'expliquai posément et succinctement ce qui se trouve en préambule du présent rapport, et que si le duc de Cirbann avait reconnu la promesse royale, les délais inusités pour la formalisation de cela, m'avaient laissé accroire à quelque changement.

Puis, d'une manière quelque peu évasive sur la manière dont cela s'était produit véritablement, messire d'Estrée finit par m'annoncer qu'en le conduisant à accepter la baronnie d'Ayn'n, « il » avait voulu s'assurer le soutien implicite de la famille d'Estrée, tout en l'isolant à l'autre bout de l'île. Quand je compris qu'il détenait son titre de l'usurpateur et non point au nom d'une régence hypothétique, je commençai par m'insurger devant ce que je qualifiai de déshonneur radical, déplorant le manquement de la noblesse cirbannaise à ses devoirs sacrés.

Le baron y répondit simplement que la noblesse avait eu des réactions contrastées, et que les secrets étaient encore bien gardés ; et pour autant, il persistait à parler d'espoir, et du renversement de l'usurpateur comme de l'anéantissement de ses forces. Je ne me privai pas de trouver quelque peu cocasse un commencement de résistance qui se manifestait par une soumission politique, quand j'avais pensé qu'une coalition entre les baronnies de Belnok, de Sanian, d'Ayn'n et le duché de Manloen, aurait pu être de quelque poids, avec le mérite de sauvegarder honneur et légitimité.

Hugolin d'Estrée trouva ma considération de la situation un peu présomptueuse pour le moins, faisant observer que les murailles de Thola ne seraient pas aisées à reprendre par les armes, et que les baronnies dépendaient par trop de la capitale pour le moment, sans compter qu'à ses yeux, faire sécession était précisément ce qu'attendait l'usurpateur pour écraser la Triade pour de bon. Il continua en m'apprenant qu'aux yeux du duc de Manloen, la clé du conflit à venir résiderait sans doute dans le peuple de Cirbann, et conclut en m'assurant qu'il avait la conviction que moi et les miens pourrions montrer l'exemple à Ayn'n à cet égard.

J'interrogeai dès lors le baron d'Estrée sur ce qu'il pouvait encore attendre véritablement de moi, car là où j'avais eu l'ambition de faire d'Ayn'n une terre marquée par les valeurs de la Triade et de ses alliés, la faire dépendre d'un tel monarque pourrait rendre la situation intenable. Je précisai que l'important pour moi n'avait pas résidé dans un titre, mais bien dans cette perspective de faire d'Ayn'n un bouclier spirituel contre les influences néfastes, selon le vœu royal de Walmund Ier.

Dans l'idée du baron d'Ayn'n, qui confia assumer sa position comme une pénitence, cette solution, toute insatisfaisante qu'elle fût moralement, lui permettrait d'avoir les mains liées et de nous laisser œuvrer librement pour concrétiser nos projets pour les terres d'Ayn'n. Ces dernières furent qualifiées par messire d'Estrée comme neutres voire hostiles pour le moment, mais il convint que proposer notre alternative était nécessaire, notamment pour que la ville fût montrée en exemple en comparaison du pouvoir en place en la capitale. Plus concrètement, Hugolin d'Estrée affirma pouvoir détacher quelques ressources à notre attention, de même que le duc de Manloen était prêt à soutenir la ville financièrement.

En conclusion, Hugolin d'Estrée me dit qu'il s'efforcerait de ménager l'usurpateur quand celui-ci apprendrait la reconstitution d'un ordre saint, et que le duc de Manloen, Hervé de l'Isle, agirait dans le même sens.


Que le Juste nous permette de purifier les cœurs et les terres dans la Vérité,

Roland de Jasperal,
Paladin de Tyr

[Animation par Wulf, pour la seconde partie]


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